Interview de Karinka de la Fourmilière BD
Bonjour Karinka, peux-tu te présenter rapidement ? Peux-tu présenter la Fourmilière ?
KarinKa, je suis autrice de bandes dessinées depuis une vingtaine d’années, scénariste, dessinatrice et coloriste sur mes premiers albums. Mon activité se concentre un peu plus sur l’écriture ces dernières années mais je continue tout de même l’illustration sur des projets plus courts ou inspirants.
Je vis dans l’est lyonnais, depuis… toujours.
Professionnellement, j’ai eu plusieurs vies. J’ai notamment travaillé une dizaine d’années comme technicienne dans le BTP, de quoi forger le caractère et la motivation.
J’ai co-fondé la maison d’édition La Fourmilière Bd en 2006, avec deux autres auteurs, David Montoro alias Pékélé et Sylvain Charemand, qui aujourd’hui restent plus ou moins impliqués dans l’association (David est toujours au CA)
Pour ma part, même si je suis publiée chez des éditeurs traditionnels comme Bamboo, Kennes, etc… Mon implication n’a pas diminué au contraire !
Je trouve à la Fourmilière la part de liberté d’écriture et un ensemble de valeurs qui me garantissent un équilibre et une indépendance essentielle pour moi.
Aujourd’hui, je gère le quotidien de la Fourmilière BD, relations auteurs, communication, gestion quotidienne. Depuis 2007, nous avons publié plus d’une trentaine de titres, 20 auteurs, et nous sommes toujours debout.
Comment est née la Fourmilière ?
Le point de départ de La fourmilière BD c’est une histoire d’amitié et une histoire d’entraide.
Au départ, nous étions 3 auteurs, Pékélé, Sylvain Charemand et moi-même qui avions signé un contrat dans une maison d’édition naissante qui voulait se spécialiser dans le gag en 3 cases, le strip comme on dit au US 😉
Les contrats étaient signés, les albums terminés, maquettés, prêts à partir chez l’imprimeur, nous n’attendions plus que la date de sortie quand l’éditeur a changé d’avis… Et tout annulé.
Un coup dur que nous avons décidé de transformer en coup de chance en prenant les choses et notre destin en main.
Les albums existaient, le choix de l’association dans notre esprit entraide et commerce équitable pour monter la structure nous a paru évident, il n’y avait plus qu’à trouver l’argent pour payer l’imprimeur.
En 2006, le crowdfunding était loin d’être courant et d’ailleurs, personne ne connaissait ce mot. Nous avons donc sillonné les festivals et salons du livres de la région et proposé nos albums en prévente. Nous n’avions que notre enthousiasme, nos bonnes têtes et des impressions maison à présenter.
Nous avons tout de même réussi à récupérer quelques milliers d’euros. Nous avons dû compléter avec nos deniers personnels mais je suis toujours étonnée qu’autant de gens nous aient fait confiance et aient participé au financement.
Comment sont choisis les auteurs édités ?
Nous fonctionnons au coup de cœur mais pas seulement. La Fourmilière BD c’est un état d’esprit, d’entraide et de solidarité et il est primordial pour nous que nos auteurs adhèrent à ces valeurs, par leurs mots et par les actes.
Nous avons une ligne éditoriale plutôt familiale, souvent humoristique mais pas que.
La démarche d’éducation populaire est au cœur de nos choix éditoriaux, et c’est un idéal que nous allons encore développer dans les années à venir.
La bande dessinée, l’illustration et l’humour sont de formidables médias pour éduquer, initier à la littérature, aux sciences, à l’Art ou aborder des sujets plus sensibles comme le neuroatypie avec la série « Moi, Chloé » ou engagés, comme le thème de l’exil et de la Migration dans « Le fabuleux voyage de maître Corbeau».
Peux-tu nous raconter ton parcours professionnel, pour en arriver aujourd’hui à la fourmilière ?
Au départ, j’ai une formation plutôt scientifique et technique, un bac math et sciences physiques, suivi d’un DUT génie civil. C’est d’ailleurs pendant mes études à l’IUT que je découvre la bande dessinée, c’est plutôt un truc de garçons à l’époque. Les copains me prêtent des albums et je découvre qu’il n’y a pas que Tintin dans la vie. Début d’une collection et d’une nouvelle passion qui pour le moment reste un loisir.
Mon diplôme en poche, je trouve non sans mal un poste dans le bâtiment, comme responsable de bureau d’études. Je gère des clients, des fournisseurs, des chantiers…
Parallèlement, je reprends mes études pour faire une licence de sciences de l’éducation à la fac, et j’intègre un collectif d’artistes avec lequel je participe à pas mal d’évènements. Nous créons des performances artistiques sur des festivals comme les invites de Villeurbanne, la biennale d’art contemporain, nous organisons des expositions dans Lyon et alentours.
Finalement, j’apprends tout ce qui me servira pour mes activités d’aujourd’hui.
Après plusieurs années dans le BTP, je m’ennuie et j’ai de plus en plus envie de me lancer dans une carrière artistique. Coup de bol, l’activité baisse chez mon employeur et je négocie mon départ. Je suis alors une formation de dessin publicitaire et je me forme aux outils graphiques informatiques de base, photoshop, illustrator… et juste pour voir, je dessine une petite BD de 3 pages et pochette sous le bras, juste pour voir, je me rends au festival de la Bulle d’or…
Ce jour-là, je rencontre Pékélé, David Montoro, qui vient de sortir son premier album BD et s’occupe d’un fanzine. Je lui montre mes pages, il est enthousiaste.
Je publie mes premières histoires dans le fanzine, participe à quelques collectifs BD publiés par la Ville de Lyon, puis David m’apprend qu’une maison d’édition est en train de se monter à Lyon, et qu’ils recherchent des projets de BD d’humour en 3 cases. Je postule avec la série “Moi, Chloé” , et lui avec “Dora”. Nos 2 projets sont pris. La maison d’édition ne se montera finalement pas, mais de ses cendres naîtra la Fourmilière BD…
Quel livre aimerais-tu éditer que tu n’as pas encore édité ?
Je ne veux surtout pas savoir. C’est tout l’intérêt de ce métier, porter une œuvre qu’on n’aurait pu imaginer.
Merci à Karinka pour avoir répondu à toutes ces questions!
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